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Détecter l’autisme au plus tôt

August 26th 2020

Candice Leblanc

Le projet DepistEye est un outil de dépistage des troubles du spectre autistique. Conçu par une équipe de linguistes et de neuropsychologues de l’ULB, il vise la détection précoce de troubles qui passent souvent « sous le radar ».    

Ce n’est pas pour rien si, aujourd’hui, on parle moins d’autisme que de troubles du spectre autistique (TSA). « Les TSA – qui touchent plus d’un enfant sur 100 – sont très hétérogènes », explique Fanny Stercq, linguiste à l’ULB et coordinatrice du projet DepistEye. « Les degrés de sévérité, les symptômes et les comorbidités varient d’un patient à l’autre. Ce qui complique et retarde d’autant plus le dépistage et le diagnostic. Surtout pour les formes moins sévères et/ou atypiques de TSA. Or, en posant tardivement le diagnostic, vous manquez une petite fenêtre d’intervention précoce qui peut faire la différence. »

 

Le langage, la grande angoisse des familles

C’est particulièrement vrai pour le langage. « La moitié des enfants présentant un TSA ont un retard de langage », explique la linguiste. « Et 30 % n’auront pas de capacités langagières fonctionnelles. C’est d’ailleurs la grande angoisse des familles… » Car, sans langage, communication et interactions sociales sont plus difficiles et l’autonomie est limitée à l’âge adulte. Raison pour laquelle le linguiste Mikhail Kissine (1) et la neuropsychologue Gaétane Deliens, chercheurs à l’ULB, ont mis au point un outil de dépistage précoce des TSA. Un projet soutenu par le programme First Spin-off de la Région wallonne et une fondation privée.

 

Dépister les TSA par eye-tracking

Cet outil de dépistage utilise la technologie de l’eye-tracking (2) et une méthodologie de neuropsychologie pour évaluer le développement langagier des jeunes enfants. Une étape clé de ce développement est, par exemple, la capacité d’associer son et image. « Nous montrons à des enfants une première vidéo où son et image sont synchrones et une seconde vidéo où ils ne le sont pas », explique Fanny Stercq. « Normalement, dès 9 mois, l’enfant est capable de faire la différence. Notre méthode permet d’analyser la trajectoire de son regard et d’en déduire s’il a bien identifié la vidéo synchrone. »

Au terme du test, les résultats permettent d’établir un score de risque de TSA. Les cas suspicieux peuvent alors être référés à un centre de diagnostic de l’autisme.

 

Des résultats très encourageants !

Pour valider le concept, les chercheurs de l’ULB ont mené une première étude sur 120 enfants de 3 à 5 ans. « Les résultats préliminaires vont au-delà de nos espérances ! Au moins l’une de nos métriques fonctionne ! »

Prochaines étapes : la création future d’une spin-off et une nouvelle étude, à plus grande échelle et sur le public cible du projet DepistEye : les enfants de moins de 3 ans. « Notre but : proposer notre outil aux médecins traitants », conclut Fanny Stercq. « À l’instar du dépistage néonatal de la surdité – pourtant moins fréquente que l’autisme –, un dépistage universel des TSA améliorerait la prise en charge des enfants concernés. »      

 

Notes :

  1. Le groupe ACTE « Autisme en Contexte : Théorie et Expérience » est dirigé par le Pr Mikhail Kissine.
  2. L’eye-tracking ou oculométrie permet d’enregistrer et d’analyser l’activité oculaire d’un sujet en suivant la trajectoire de son regard.